LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE

LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE

« Par Amour » de Shannen Rimphrey : une belle histoire noyée dans un océan de coquilles

 

 

 

266 pages de narration. Telle est la performance de Shannen Rimphrey dans son ouvrage « Par Amour ». Accrochant est le moins qu’on puisse dire de l’intrigue de ce roman.

 


 

Malheureusement, il pèche furieusement par les supplices qu’il fait subir à la langue française. Les fautes, nombreuses, d’orthographe, d’accord grammatical, de conjugaison, d’inattention souillent  les  pages et diluent le plaisir de la lecture. On aurait dit un rendez-vous avec les incorrections linguistiques et les écarts grammaticaux les plus inimaginables. Dès la page dédicatoire, on est atteint en plein cœur : « Ce livre je le dédis… ». Ouille ! Lorsqu’on sait que le verbe du premier groupe « dédier » est conjugué au présent et à la première personne du singulier, on ne peut que s’interroger. Ce livre est il passé au tamis d’un comité de correcteurs ? Les coquilles, en effet, fourmillent avec une régularité écœurante. Amusons‑nous à en détecter quelques unes : « Tu viens me faire me donner un bisou » (page 12), « un gérant de cabine qui il fallait le reconnaitre fallait le reconnaitre, avait un faible… » (page 44), « sa tendresse, son l’amour » (page 50), « dans son bureau pour à taper » (67), « elle les avaient d’ailleurs rangeyes » (page 68), « cette femme qui accompagnatrice » (page 86). Vous comprenez quelque chose ? Les fautes d’orthographe ne sont pas en reste : « les laissant tous deux interdis… », « bien sûre » (page 86), « lui raconter ce compte » (page 90). Mais il y a pire. Le récit dégouline de fautes d’accord grammatical : « Christopher c’était indubitablement crispé… » (page 17) « la multiplicité de marque de voiture » (page 27), « elle mangeait trop…et était devenu » (page 28), « mon chère et tendre docteur Danielle » (page 41), « treize heure précise », « ses pensées qui étaient tout le temps pétris de Sandra » (page 60), « le régime pouvait être suivit » (page 63), « ils étaient partit » (page 67), « mon chère » (page 69). La conjugaison des verbes est une torture : « et comme une vie d’amour ne peu pas durer » (page 46), « les ivoiriens aie eu le temps » (page 58), « t’inquiètes pas » (page 64), « je te conseil » (page 81), « bien que se fût » (page 83).

Souffrez  que nous nous arrêtions, à mi-chemin, à la page 100. Comment expliquer ce déploiement de coquilles, de lapsus calami et d’écarts grammaticaux ? Une question que la maison d’édition doit examiner avec froideur et professionnalisme. Et cela commence par une autocritique, une mise en cause. C’est la crédibilité des lettres ivoiriennes qui est ici en jeu. Le talent, ce n’est pas ce qui manque à Shannen. L’histoire qu’elle narre dans ce bouquin ne manque pas de qualités : complexité, suspense, péripéties. L’intrigue se veut emballante et imprévisible dans ses différentes articulations. 

Suite à la venue au monde de sa fille Shelsy, Trischa est réduite à subir les incartades de Christopher,  son époux. Sur les conseils avisés sa meilleure amie, elle décide de reconquérir son mari en suivant un régime. Au moment où une lueur pointe à l’horizon en crevant les ténèbres, Sandra,  par des pouvoirs mystiques envoûte Christopher. De là commencent la déchéance psychologique du mari infidèle et la déliquescence progressive du foyer. Pour Trischa, l’adultère s’impose comme un exutoire. Au bout… le divorce, inévitable et implacable.

Une fiction étonnante et douloureuse qui met à nu les convulsions d’un foyer pris au piège des escapades d’un époux volage. Amertume, déchirure et incertitude rythment les pages. Avec, en fin de compte, une chute à équidistance des attentes des lecteurs. Une interrogation tyrannique : le mariage est ce le tombeau de l’amour ? Le foyer, qui devait le consacrer prend la vulnérabilité d’une braise fragile qu’il faut savoir entretenir de crainte qu’elle s’éteigne. La femme bénie par le mariage a besoin de rester sur le qui-vive pour préserver son bonheur. C’est un défi  de tout instant. La plume de Shannen se veut sans complaisance. Elle stigmatise les manquements de la gent masculine. Et l’image de la femme non plus n’est pas rose.  « Par Amour » est loin d’une histoire classique à l’eau de rose. C’est un témoignage poignant des pièges et des turpitudes qui menacent les couples. Adultères conscients et lucides. Escapades et incartades de l’époux frivole. Blessures et larmes de l’épouse abusée. Refoulement et désir de vengeance de la maîtresse insatiable. La jeune auteure nous ouvre les yeux sur la fragilité du mariage et les affres des relations intimes extraconjugales. Le personnage de Sandra est un condensé des rancœurs et des frustrations de la maîtresse lésée qui pour se venger pactise avec le diable. Son itinéraire endiablé est révélateur du versant horrible de l’amour.

Rebondissements, rapidité, suspense. Une histoire bien construite qui emballe et séduit. L’humeur du lecteur ondoie entre le vermeil et le fade, le sourire et la tristesse jusqu’à la dernière page. Le style de Shannen est  fringant, guirellet et vif. Aucune place pour l’ennui. Un talent pour l’affabulation au dessus de la moyenne. Le récit coule, court, bondit et rebondit. Les dialogues sont brefs et tranchés. Au discours direct ou indirect, la plume de la jeune artiste préfère le discours indirect libre qui a l’avantage de la vivacité et de la rapidité.

Débarrassé de ses bégaiements grammaticaux et orthographiques, ce récit facilement pourrait s’imposer comme l’un des plus émouvants de la Collection Lune et Miel.

 

ETTY Macaire

Critique littéraire

 

Shannen Rimphrey, Par Amour, Les Editions Balafons, Abidjan, 2012

 

in LE NOUVEAU COURRIER D'Abidjan, vingt sept juillet 2012

 



28/07/2012
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