LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE

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Jours de châtiments de Yodé Simplice Dion/ Un philosophe dénonce la vanité des hommes

« Jours de Châtiments » de Yodé Simplice Dion est un recueil de 12 nouvelles. Il a été publié en novembre 2012 aux éditions Balafons.

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Le titre « Jours de Châtiments »  claque comme un fouet et scande spiritualité et jugement dernier. Le ton très tôt est à la gravité. Le livre couve douze récits. Douze comme les douze signes du zodiaque, comme les douze mois de l’année. Le nombre choisi ici n’est pas innocent. Il réverbère l’équilibre, la force, le mystère. C’est que les nouvelles, certaines nouvelles, pour être plus rigoureux - de Dion nous mettent en contact avec un flot de symboles, de signes, de codes.

Le monde qu’il arpente est structuré par des lois divines dont le viol est source de conséquences. La pauvreté ou la richesse, l’ingratitude ou la gratitude, l’élévation ou la chute…tout est à la fois cause et effet. Tout acte selon sa motivation a un retentissement qui, tôt ou tard, nous brise ou nous glorifie. Les références aux grands livres de spiritualité sont nombreuses ; une place de choix est faite à la bible. Au fil de la lecture, on est frappé par la grande culture spirituelle de l’auteur. Il n’y a aucun doute : Dion nous promène dans un univers au carrefour du mysticisme, de la spiritualité et la religion.

Certaines  nouvelles de ce recueil, notamment « la cité maudite », « le chantier », « l’ange de la grande horreur », « le second Adam », « le trésor de Jésus » et « la vengeance de l’au-delà » épousent les contours de la fable. Les chutes sont telles des appels à cultiver le jardin des valeurs cardinales que sont l’humilité, la reconnaissance, la tolérance, la patience. L’auteur les met en lumière sous la forme d’une moralité, d’une maxime, d’un aphorisme. « C’est de la profanation que de maltraiter l’étranger. C’est folie que de se moquer de Dieu » (page 18), « L’homme ne doit point venir à Dieu à cause des miracles et des bienfaits qui en résulteront pour lui. Il doit adorer Dieu parce qu’IL est Dieu » (page 61), etc. Les personnages qui peuplent ces nouvelles – qu’ils se nomment Bako, David, Henri, Maninga, Oulaï, Kasobourama, Jésus… sont des livres ouverts où peut se lire une sagesse ou une leçon de vie.

A côté de ces textes qui mêlent mystère et spiritualité, rampent trois ou quatre textes moins profonds et souvent carrément prosaïques cassant le rythme haletant du livre. Ces textes qui tirent leur matière de la crise ivoirienne suintent du parti pris politique de l’auteur. Les accusations à peine voilées comme un frisson traversent des noms, des mots et expressions bien connus des Ivoiriens comme « l’escadron de la mort » «Akuédo », « les refondeurs » (qui rappelle les refondateurs), « le vivre-ensemble » « la rébellion » « les jeunes gens » « pureté de sang » « le front pour la république » « etc. Les thèmes qui ont alimenté le débat politique ivoirien y sont repris sous l’angle d’un militantisme à peine voilé. On peut évoquer les thèmes de l’exclusion, de la xénophobie, de la violence estudiantine, des coups d’Etat, de la rébellion, du néocolonialisme, de la refondation.  Des sommets des textes au souffle spirituel nous périclitons dans les vallées des textes à relents politiciens. Ces derniers sont les moins inspirés, les moins élaborés. Comme quoi, là où la politique passe, tout décline. Autant les textes au souffle mystico-spirituel scintillent autant les textes « politiques » ont du mal à décoller. L’artiste est comme pris au piège dans un monde dont il ignore les codes. Comme l’albatros, le voilà « veule et gauche ».

Dans l’ensemble, l’écriture de « Jours de châtiments » est parsemée de belles images. Les phrases, dans l’ensemble, sont bien soignées. Cristallines, elles sont la plupart du temps juxtaposées.  Le goût du créateur pour les beaux mots est impressionnant. Souvent, dans l’univers des vocables du créateur surgissent des mots rares en rupture avec la majorité.

En somme, Simplice Dion, par le biais de « Jours de Châtiments », flétrit toutes les dérives et déviations qui voilent le soleil de la vie. Il parle à l’Ivoirien, à l’Africain, à l’homme tout court.

 

ETTY Macaire

Yodé Simplice Dion, Jours châtiments, L’Harmattan-Côte d’Ivoire, 2012.

In Le Nouveau Courrier du 27 septembre 2013



29/09/2013
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