Femme, Genre et Pouvoir en Afrique de F. Kaudjhis‑Offoumou : Une réflexion approfondie pour comprendre la Femme Africaine
Femme, Genre et Pouvoir en Afrique est un essai de l’Ivoirienne Françoise Kaudjhis‑Offoumou. Le livre a été publié par les NEI/CEDA en 2011. Françoise Kaudjhis‑Offoumou est juriste de formation. Avocate, formatrice et experte consultante Internationale en Démocratie et Droits de l’homme. Elle est connue pour ses connaissances approfondies des questions du genre et a une expérience énorme des questions électorales. Elle fait indubitablement partie des personnes les plus outillées en Afrique francophone pour traiter avec profondeur et méthodologie ce sujet à la fois grave et complexe.
Femme, Genre et Pouvoir en Afrique est un ouvrage livre de 322 pages, préfacé par Chantal Compaoré, Première Dame du Burkina Faso, se veut un document pédagogique visant à instruire le lecteur sur les rapports ambigus que la femme entretient avec le pouvoir en Afrique. Bien que dénonciateur sur certains points, la plume de Kaudjhis‑Offoumou est guidée par le souci d’informer et d’éclairer. Car malgré tous les discours et les écrits lus ou entendus ici et là, certains aspects des questions du genre, précisément des raisons profondes de la marginalisation de la femme de la gestion du pouvoir exécutif, n’est pas bien connus.
Pour planter le décor, l’auteure dans son introduction nous instruit sur l’historique des différents combats que les femmes ont menés à travers le temps. Nonobstant des victoires et des avancées remportées ici et là, la femme est encore aux sous sol de l’édifice du pouvoir exécutif.
Subdivisés en six chapitres, l’ouvrage Femme, Genre et Pouvoir en Afrique propose en premier lieu une approche définitionnelle d’une panoplie de concepts comme pour mettre à niveau les connaissances du lecteur sur certains termes galvaudés et souvent méconnus. Le second, le plus logiquement au monde, explique les fondements juridiques et socioculturels de la situation de la femme qui est loin d’être reluisante. Certes, son statut de « porteuse de vie » dans la société africaine et l’existence de certaines dispositions juridiques sont en sa faveur, mais dans les faits, elle est victime quotidiennement et injustement d’exclusion et de marginalisation. « Malgré tout cet arsenal juridique, la Femme et le Pouvoir ne semblent pas faire bon ménage » écrit l’auteure à la page 70. En gros, la situation de la femme est loin de sortir de sa précarité. Que l’on se situe au niveau économique, social et sanitaire, elle est victime d’injustice et de marginalisation.
Le chapitre trois est consacré à la recherche des causes de la faible représentativité des femmes dans la sphère politique. Il est riche en révélations et en découvertes. Tout au long de cette section Kaudjhis‑Offoumou nous donne l’occasion de toucher du doigt le martyre de la femme dans la société africaine où la phallocratie est un véritable serpent de mer. En plus des obstacles généraux, l’itinéraire de la femme se voit obstrué par des obstacles spécifiques et même vicieux. Dans le chapitre quatre Kaudjhis‑Offoumou, au nom des femmes, propose une kyrielle de voies susceptibles d’extraire la femme de tous les goulots qui la brisent et jugulent son ascension. Kaudjhis‑Offoumou avec des détails explicatifs, s’étend sur les conditions à réunir pour aider les femmes à accéder, elle aussi, au pouvoir. Elle ne néglige aucun aspect de la question. En plus des conditions juridiques et politiques, elle fait une analyse critique de certaines solutions souvent avancées telles le système des quotas.
Le chapitre cinq est focalisé en grande partie sur le cas ivoirien. Il traite de l’impact de la crise sur les rapports de Genre et le pouvoir. Là, Kaudjhis‑Offoumou passe en revue tous les traumatismes que subit la femme dans un pays en crise. Victime incontournable des conflits armés, la femme est, avec l’enfant, le maillon le plus exposé dans une situation de guerre. Même devenue soldat, elle est exploitée et abusée d’une manière ou d’une autre. Pire : Même au terme de la guerre, l’enfer de la femme est loin de finir du moment où elle doit faire face au veuvage ou/et à la douleur de la mère ayant perdu son rejeton durant le conflit. Kaudjhis‑Offoumou avec des termes poignants et en convoquant de nombreux exemples, dresse avec réalisme le tableau du calvaire de la femme africaine dans un pays en guerre. Dans le chapitre six qui clôt le livre la célèbre juriste déploie un chapelet de recommandations les unes aussi judicieuses que les autres. Elle passe en revue les domaines : social, économique, juridique, culturel, sanitaire, politique…bref tous les domaines où quelque chose peut être fait pour atténuer le supplice de la femme et la rapprocher de la sphère du pouvoir.
Femme, Genre et Pouvoir en Afrique de Françoise Kaudjhis‑Offoumou n’est pas un ouvrage féministe, ni un recueil de lamentations où l’auteur recherche l’émotion. Il est loin des accusations stériles et de la fiction qui enchante le lectorat féminin. C’est un ouvrage construit sur du solide. C’est un ouvrage qui se veut méthodique, scientifique, démonstratif pour lever le voile sur le fardeau qui « « penche la femme vers le bas ». En militant pour les droits de la femme, Kaudjhis‑Offoumou se bat pour l’avènement d’un monde plus juste et plus équitable. Car chaque fois que l’homme (le mâle) ou l’enfant est dans une situation de détresse, la femme, par voie de conséquence, subit les effets immédiats. Il faut, à la lumière de cette vérité, œuvrer pour l’épanouissement de la femme. « La femme et le monde doivent veiller à ce que le plafond de verre soit brisé à jamais à tous les niveaux et que la moitié de la population, la moitié de la terre, la moitié du ciel, occupe la place qui lui revient dans le pouvoir de décision » (page 283).
Bien que les références aux dispositions légales et autres textes officiels et internationaux aient de quoi rebuter le lecteur distrait, le livre de Kaudjhis‑Offoumou se distingue élégamment par sa profondeur documentaire. Ecrit dans une langue qui se veut utilitaire et pragmatique, ce livre se présente comme un ouvrage de référence pour la formation des formateurs dans toutes les questions en rapport avec le thème du genre et du pouvoir. C’est le type de livre que doivent lire urgemment non seulement les femmes, mais aussi les hommes, les éducateurs, les responsables des ONG des droits de l’homme et notamment les gouvernants.
ETTY Macaire
Françoise Kaudhis‑Offoumou, Femme, Genre et Pouvoir en Afrique, NEI/CEDA, Abidjan, 2011
Publié dans Le Nouveau Courrier du 13 avril 2012
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