LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE

LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE

A la découverte de Sidney Karams, promoteur de la bibliothèque sociale le « romandroom »

Si le grand public ne le connait pas, il n’en est pas de même des certains journalistes et hommes de culture de Côte d’Ivoire. De lui, ils savent qu’il souffre d’un handicap physique. De lui, ils savent qu’il a créé par ses propres et maigres moyens une bibliothèque sociale, dénommée Romandroom. Mais pour lui et en faveur de son « palais » peu de choses, en dépit des promesses, a été fait pour l’aider dans son combat pour l’accès des plus démunis au livre.

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A Treichville Arras 1, il est tel un messie venu pour faire reculer les frontières de l’obscurantisme. Par le livre. Son atout c’est sa passion pour la littérature. Cette passion comme un feu divin embrase son intérieur, ses rêves, ses actes. Et des questions, nombreuses et tyranniques, de se télescoper dans sa tête de « porteur d’espoir » pour utiliser la belle formule de Sery Bailly. Que faire pour rendre son espace plus attrayant ? Que faire pour sauver les livres des aléas climatiques d’autant plus que son local n’est pas un asile de sécurité et de confort ? Tel Jean Baptiste prêchant dans le désert, Sidney crie depuis 2003 aux oreilles des autorités pour que l’aide qu’il attend lui soit apportée. Combien de fois à la veille d’une élection à Treichville n’a-t-il pas été approché, étourdi par des avalanches de promesses jamais tenues ? Combien de fois des individus lugubres n’ont-ils pas voulu profiter de l’état de sa bibliothèque pour se mettre plein la poche ? Mais lui est resté le même. Digne ! Malheureux de voir son local dans un état lamentable, mais heureux de servir les plus démunis, d’offrir un espace à tous ceux qui sont assoiffés de lecture. Sidney continue son combat. Des écrivains  et de grands hommes de culture commencent à fréquenter son univers. La presse en parle ; des curieux viennent étancher leur faim de le voir. Et Sidney  de rêver, de voir grand, de voir son espace sortir de la précarité. «  Je vise la lune , si je la rate , je tomberai dans les étoiles et je serai une étoile du rêve africain », m’écrivait-il.

 

La bibliothèque sociale, le romandroom, est un modeste cadre culturel et éducatif. Il est situé à Treichville au quartier Arras 1, face à la gare de Bassam, derrière le bâtiment W. C’est un local de 1,90 mètre sur 5 mètres. La toiture, le talon d’Achille de cette architecture de fortune, est faite de contre-plaqués et de chevrons de qualité douteuse. Les livres du romandroom reposent sur des étagères artisanales fabriquées par le maître des lieux lui-même. La bibliothèque souffre d’un grave problème d’étanchéité qui appelle à une rapide réaction, de crainte que toute la richesse qu’elle héberge soit engloutie par une pluie torrentielle.

 

Mais qui est cet homme si généreux, si « fou » qui a bien voulu, sans grand moyen, créer un espace d’échanges et de lecture ? Sidney Karams, de son vrai nom Gbané Karamoko, est originaire de Bondoukou. Handicapé physique dès l’âge d’un an et 3 mois, atteint de la polio, il suit quand même des études primaires et secondaires avant d’intégrer les Cours Castaing, l’Institut National des Arts et l’Insaac pour ses études supérieures. Pour rester en éveil, il suit, plusieurs cours par correspondance dans des disciplines comme la graphologie, le théâtre, la menuiserie, la peinture, l’imprimerie, la diction etc. L’amour de Sidney Karams pour le livre remonte à son plus jeune âge, au primaire, où chaque jour il se laisse emporté par les aventures des héros de Bande Dessinée dont les plus célèbres sont Zembla, Blek, Tarzan, Astérix…C’est pendant cette période qu’il a commencé à nourrir son rêve de créer une bibliothèque en vue de partager sa passion de la lecture. En 2003, il réussit tant bien que mal à concrétiser son rêve par la création du Roamandroom. Pour y arriver, quel parcours ! Il se fit démarcheur dans cinq imprimeries de la place…C’est avec ses commissions et pourcentage qu’il a pu, au moyens de matériels de seconde main à construire son local et à acheter des livres dans « les librairies par terre ».

 

Au total, depuis une décennie Sidney Karams est au service de la culture et de la promotion du livre de façon bénévole, sans soutien. Il reconnait que depuis cette année 2013, via internet, des voix s’élèvent pour parler de son projet ; des associations et des individus s’intéressent à son action. Ce que cet « agitateur de conscience» attend est que des maires, des ministres, des Ong et autres associations franchissent l’étape des bonnes intentions pour l’aider à réhabiliter sa « caverne » et à le doter de livres et autres équipements modernes pour le bonheur des enfants et des jeunes ivoiriens.

 

Etty Macaire

in Le Nouveau Courrier du 06 Septembre 2013



08/09/2013
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