LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE

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PRIX LITTÉRAIRES: LES FEMMES TRIOMPHENT

 

 

 Par Gaëlle Rolin


Portraits de Emmanuelle Pireyre, Julie Otsuka et Scholastique Mukasonga, lauréates des prix Médicis, Femina étranger et Renaudot

 

 

L’une est rwandaise, l’autre, américaine et la troisième, française. Sur les cinq grands prix littéraires remis cette semaine, trois ont récompensé des femmes. Qui sont Scholastique Mukasonga, Julie Otsuka et Emmanuelle Pireyre, respectivement lauréates des prix Renaudot, Femina étranger et Médicis ? Focus.


 

 

E. Pireyre                                  M. Moukassonga                 J. Otsuka 


Julie Otsuka

« La deuxième guerre était un sujet qu’on n’abordait pas », expliquait récemment Julie Otsuka sur France Inter. « Le silence est typique dans ces familles américaines d’origine japonaise. D’ailleurs, c’est typiquement japonais de ne pas parler de la souffrance qu’on ressent. » 
Américaine d’origine japonaise, la romancière est née en Californie, il y a cinquante ans. C’est d’abord aux beaux-arts qu’elle se consacre avant de publier en 2004 son premier roman, Quand l’empereur était un dieu(éd. Phébus), dans lequel elle évoque déjà l’histoire de l’immigration japonaise en terre américaine. Une histoire douloureuse et méconnue, puisque l’auteure y décrit les camps dans lesquels les Japonais ont été parqués après les attaques de Pearl Harbor.

Des femmes au destin souvent sacrifié

Issue elle-même de deux parents d’origine japonaise, Julie Otsuka a mis du temps à rassembler les fragments de ses racines. C’est seulement à la fin des années 80 qu’elle met la main sur des lettres que son grand-père avait envoyées depuis ces camps à sa grand-mère. Aujourd’hui, avec Certaines n’avaient jamais vu la mer, Julie Otsuka raconte l’histoire de ces picture brides, ces Japonaises qui ont traversé le Pacifique pour retrouver un futur mari déjà installé en Californie et qu’elles n’avaient jamais vu qu’en photo. Des femmes au destin souvent sacrifié, et qui ont peiné à trouver leur place aux États-Unis. « Ces histoires sont très connues chez les Japonais, mais peu en dehors de la communauté. D’ailleurs, en règle générale, les jeunes Américains, ignorants du sort qui nous a été fait, pensent que ce que je raconte est un récit pur ! » Certaines n’avaient jamais vu la mer, déjà couronné du prestigieux PEN/Faulkner Award for Fiction, a été, mardi, auréolé du prix Femina étranger.

De la nécessité de rêver au génocide rwandais

Emmanuelle Pireyre

C’est une Lyonnaise de 43 ans, originaire de Clermont-Ferrand, qui rêve de transformer « la foire internationale » qu’est le monde « en féérie », qui a reçu le prestigieux prix Médicis. Féérie générale est le quatrième roman d’Emmanuelle Pireyre. Poète, elle est aussi à l’origine de fictions radiophoniques, diffusées notamment sur France Culture.

Peu connue, elle a pourtant été adoubée par la profession, puisqu’en 2000, c’est l’éditeur de Michel Houellebecq, Maurice Nadeau, qui la remarque et publie son premier ouvrage, Congélations et décongélations, et autres traitements appliqués aux circonstances, puisMes vêtements ne sont pas des draps de lit, en 2001. En 2006, paraît au Seuil Comment faire disparaître la terre ? 
Il a fallu cinq années à Emmanuelle Pireyre pour donner naissance à Féérie générale, un roman-collage qui surprend par l’audace de sa forme, constituée d’extraits de forums internet, d’articles de presse, d’e-mails et de SMS. Pour être dans les meilleures conditions pour écrire, la romancière a besoin d’un maximum de silence. C’est donc armée d’une couverture sur le dos, de bouchons antibruit enfoncés dans les oreilles et d’un casque contre les nuisances sonores par-dessus, qu’elle s’installe chaque matin à son bureau, comme elle l’expliquait mercredi au journal 20 Minutes. 

Scholastique Mukasonga

« Tous les enfants sont des enfants, mais toi, tu es plus qu’une enfant ! J’ai de la chance que tu sois née. » Sur son site, Scholastique Mukasonga se souvient de ces mots, prononcés par sa mère. Avant de poursuivre avec cette conclusion, glaçante : « Pressentait-elle que je serai, avec mon frère André, la seule survivante de la famille et que ce serait moi qui serai chargée de leur mémoire ? »

Mukasonga porte en elle le drame rwandais

Née en 1956 au Rwanda, Scholastique Mukasonga porte en elle le drame rwandais : issue d’une famille tutsie, elle a subi l’humiliation, l’exode, avant de perdre vingt-sept personnes de sa famille, dont sa mère, massacrées par les Hutus en 1994. Elle est l’une des seules de sa famille à avoir fait des études. Notre-Dame du Nil est son quatrième ouvrage, et comme les trois premiers, il revient sur ce génocide. Le décor est planté dans un lycée de jeunes filles, semblable à celui que la romancière a elle-même fréquenté, dans lequel le lecteur observe progressivement les ravages de la propagande, qui mènera aux persécutions et aux meurtres raciaux. Scholastique Mukasonga, aujourd’hui assistante sociale en Normandie, a créé une association qui vient en aide aux orphelins rwandais. Celle qui ne figurait même pas dans la sélection finale du Renaudot est le cinquième auteur africain à être couronné par ce prix après le Malien Yambo Ouologuem, l’Ivoirien Ahmadou Kourouma, le Franco-Congolais Alain Mabanckou et le Guinéen Tierno Monénembo. Notre-Dame du Nil a également reçu le prix Ahmadou-Kourouma, décerné en Suisse, qui récompense un ouvrage consacré à l’Afrique noire. 

Source : http://madame.lefigaro.fr/art-de-vivre/prix-litteraires-femmes-triomphent-091112-304738



09/11/2012
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