L’odyssée du Mot
Etait là
le Mot
au Jour Premier
à l’aurore originelle.
A l’orée du Jardin
à l’instant fœtus
du Grand Verbe Fécond
de la Fertile Déclame.
Ah la divine parturition !
Où le Néant
au terme de mille douleurs
accoucha pantelant
LA VIE
Le mot hier
Le mot aujourd’hui
Le mot demain
Le mot toujours
Il s’accouple
Il s’agglutine
Il se multiplie
Il s’étire
Il se répète
pour dire l’indicible émotion
pour donner vie au trépas
pour arroser la fleur asséchée
Il se fait secours
il se fait aide
du poète infertile
secours
de l’aède monocorde
viatique
du chantre tari
Mot généreux
termite inlassable
pierre incorruptible !
Le voilà
qui
recueille les larmes de l’orphelin
adoucit les blessures de la veuve
réconcilie les partitions furieuses
chante les joies immenses.
Jamais
Ses freins ne se rongent
Jamais
Sa lampe ne s’éteint
Jamais
Sa source ne tarit
Jamais
Sa voix de s’altère
Jamais
Son ventre ne se rassasie
Jamais au grand jamais
Partout il investit son esprit
Dans l’incantation du sorcier
Dans l’invocation des mânes
Dans les imprécations de l’écorché
Dans les récitations des mantras
Il libère
Il se déchaîne au galop
Il encercle comme un taureau
Il assiège tel un héros
Le mot
Dans la divination
Pour l’oraison
Au-delà des saisons
A contre-saison
A tort ou à raison
Le mot
couché
au cœur de la psalmodie
débout
dans le ventre de la prière
donnant vie au cantique
Le mot
dans tous ses états
de toutes les couleurs
de tous les poids
Mot orgasme
Mot volcan
Mot ouragan
Mot tonnerre
Mot terreur
Mot en furie
Mots en saillies
Mot en transe
Mot qui danse
Mot de véhémence
Mot de décence
Mot de démence
Mot de semence
Au nom de l’alternance
Au nom de la connaissance
Au nom de la paix des consciences
Le mot
Souvent rouge de colère
Souvent brûlant de zèle
Souvent prédateur enragé
Dans la bouche athée
du politicien
de l’anarchique
de l’activiste
de l’arriviste
du manipulateur
du zélateur
du dictateur
Par ses dérives
ont été scellés des divorces impossibles
Des amitiés prometteuses pendues
trahies des amours inoxydables
Des mariages eternels crucifiés
ruinées des alliances séculaires
Des mensonges vilains glorifiés
vantées des trahisons acérées
Et le mot silencieux
Et le mot braillard
Et le mot complice
S’en va
Indomptable
Vivant
Eternel
(Lors de mon séjour de trois jours chez l’écrivain
Tiburce Koffi)
Bingerville le 17 mai 2012
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